Venue prochaine d'une délégation féminine en Europe - Peuples zapatistes

20/02/2021 15:54

Les zapatistes ont annoncé la prochaine venue d’une délégation féminine en Europe. Nous reproduisons ici la traduction de leur communiqué depuis l’espagnol que nous a fait parvenir une camarade du groupe de traduction trad sexta.

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Sixième partie : Une montagne en haute mer

Communiqué du Comité clandestin révolutionnaire indigène - Commandement général de l’Armée Zapatiste de Libération Nationale

Mexique, 5 octobre 2020

Au Congrès national indigène - Conseil indigène de gouvernement,
À la Sexta nationale et internationale,
Aux Réseaux de résistance et de rébellion,
Aux personnes honnêtes qui résistent dans tous les coins de la planète,

Nous, peuples originels de racine maya et zapatistes, nous vous saluons et vous disons ce qui est venu à notre pensée commune, en accord avec ce que nous voyons, entendons et ressentons.

Premièrement. - Nous voyons et écoutons un monde malade dans sa vie sociale, fragmenté en des millions de personnes étrangères les unes aux autres, accrochées à leur survie individuelle, mais unies sous l’oppression d’un système prêt à tout pour assouvir sa soif de profit, même lorsqu’il est clair que son chemin va à l’encontre de l’existence de la planète Terre.

L’aberration du système et sa stupide défense du « progrès » et de la « modernité » se heurte à une réalité criminelle : les féminicides. L’assassinat de femmes n’a ni couleur ni nationalité, il est mondial. S’il est absurde et insensé que quelqu’un soit poursuivi, enlevé, assassiné en raison de la couleur de sa peau, de sa race, de sa culture, de ses croyances, on ne peut pas croire que le fait d’être une femme équivaille à une sentence de marginalisation et de mort.

Dans cette escalade prévisible (harcèlement, violence physique, mutilation et meurtre), et avec l’aval d’une impunité structurelle (« elle le méritait », « elle avait des tatouages », « que faisait-elle dans cet endroit-là à ce moment-là ? », « dans cette tenue, il fallait s’y attendre »), les meurtres de femmes n’ont pas d’autre logique criminelle que celle du système. De différentes couches sociales, de différentes races, d’âges allant de la petite enfance à la vieillesse, et dans des géographies très éloignées les unes des autres, la seule constante est le genre. Et le système est incapable d’expliquer pourquoi cela va de pair avec son « développement » et son « progrès ». Dans la révoltante statistique des décès, plus une société est « développée », plus le nombre de victimes est élevé dans cette authentique guerre de genres.

Et la « civilisation » semble nous dire, à nous les peuples autochtones : « La preuve de votre sous-développement réside dans votre faible taux de féminicide. Ayez vos méga-projets, vos trains, vos centrales thermoélectriques, vos mines, vos barrages, vos centres commerciaux, vos magasins d’électroménager – avec une chaîne de télévision incluse – et apprenez à consommer. Soyez comme nous. Pour payer la dette de cette aide progressiste, vos terres, vos eaux, vos cultures, vos dignités ne suffisent pas. Il faut y ajouter la vie des femmes. »

Deuxièmement. - Nous voyons et écoutons la nature blessée à mort qui, dans son agonie, avertit l’humanité que le pire est encore à venir. Chaque catastrophe « naturelle » annonce la suivante et oublie comme par hasard que c’est l’action d’un système humain qui en est la cause.

La mort et la destruction ne sont plus désormais une chose lointaine, limitée par des frontières, respectant les douanes et les conventions internationales. La destruction, dans n’importe quel coin du monde, a des répercussions sur toute la planète.

Troisièmement. - Nous voyons et écoutons les puissants battre en retraite et se cacher derrière les soi-disant États-nations et leurs murs. Et, dans cet impossible bond en arrière, ils ravivent des nationalismes fascistes, des chauvinismes ridicules et des discours assourdissants. Face à cela, nous attirons l’attention sur les possibles guerres à venir : celles qui se nourrissent d’histoires fausses, creuses et mensongères, et qui convertissent nationalités et races en suprématies imposées par le biais de la mort et de la destruction. Dans les différents pays, le conflit se joue entre les contremaîtres et ceux qui aspirent à leur succéder, masquant le fait que le patron, le maître, le petit chef reste le même, et qu’il n’a pas d’autre nationalité que celle de l’argent. Pendant ce temps, les organismes internationaux dépérissent et se réduisent à de simples sigles, tels des pièces de musée - voire même pas cela.

Au milieu de l’obscurité et de la confusion qui précèdent ces guerres, nous écoutons et observons comment toute lueur de créativité, d’intelligence et de rationalité est attaquée, assiégée et persécutée. Face à la pensée critique, les puissants requièrent, exigent et imposent leurs fanatismes. La mort qu’ils plantent, cultivent et récoltent n’est pas seulement la mort physique ; elle comprend également l’extinction de l’universalité propre à l’humanité – l’intelligence -, ses avancées et ses réalisations. De nouveaux courants ésotériques renaissent ou sont créés, laïques ou non, déguisés en modes intellectuelles ou en pseudo-sciences ; et on prétend inféoder les arts et les sciences à des militantismes politiques.

Quatrièmement. - La pandémie de Covid-19 a montré non seulement les vulnérabilités de l’être humain, mais aussi l’avidité et la stupidité des différents gouvernements nationaux et de leurs soi-disantes oppositions. Les mesures du plus élémentaire bon sens ont été méprisées, en pariant toujours que la pandémie serait de courte durée. Lorsque l’avancée de la maladie a pris des proportions toujours plus importantes, les chiffres ont commencé à se substituer aux tragédies. La mort a ainsi été convertie en un chiffre noyé quotidiennement au milieu des scandales et des déclarations. Un comparatif morbide entre des nationalismes ridicules. La moyenne des buts et des reprises de dribbles, pour déterminer quelle est la pire ou la meilleure équipe, la meilleure nation.

Comme le précise l’un des textes précédents, au sein du zapatisme nous avons opté pour la prévention et l’application de mesures sanitaires qui avaient alors été prises suite à la consultation de scientifiques qui nous ont guidés et nous ont offert leur aide, sans aucune hésitation. Nous, les peuples zapatistes, leur en sommes reconnaissants et nous avons voulu le démontrer ainsi. Après 6 mois d’application de ces mesures (masques ou équivalents pour se couvrir la bouche, distance entre les personnes, cessation des contacts personnels directs avec les zones urbaines, quarantaine de 15 jours pour les personnes ayant pu avoir été en contact avec des personnes infectées, lavage fréquent à l’eau et au savon), nous regrettons le décès de 3 camarades qui présentaient deux ou plusieurs symptômes associés au Covid-19 et qui avaient eu un contact direct avec des personnes infectées.

Huit autres compañeros et une compañera, morts pendant cette période, présentaient un des symptômes. Comme nous ne sommes pas en mesure de réaliser des tests, nous assumons qu’un total de 12 compañeroas sont morts à cause du Covid-19 (des scientifiques nous ont conseillé d’assumer le fait que toute difficulté respiratoire serait due au Covid-19). Ces 12 disparitions relèvent de notre responsabilité. Ce n’est pas la faute de la 4T [NDLT : « Quatrième Transformation », nom donné par la propagande de Lopez Obrador à son mandat] ni de l’opposition, ni des néolibéraux, ni des néoconservateurs, ni des conspirations, ni de complots. Nous pensons plutôt que nous aurions dû prendre encore davantage de précautions.

Actuellement, avec la disparition de ces 12 compañeroas sur les épaules, nous améliorons dans toutes les communautés les mesures de prévention, avec le soutien à présent d’Organisations Non Gouvernementales et de scientifiques qui, à titre individuel ou collectif, nous guident quant à la manière de mieux nous préparer pour affronter une possible résurgence. Des dizaines de milliers de masques (conçus spécialement afin qu’un probable porteur de virus ne puisse pas contaminer d’autres personnes, à bas prix, réutilisables et adaptés aux circonstances) ont été distribués dans toutes les communautés. D’autres dizaines de milliers sont fabriqués dans les ateliers de broderie et de couture des insurgé·e·s et dans les villages. L’emploi massif des masques, les quarantaines de deux semaines pour celleux qui pourraient être infecté·e·s, la distance et le lavage récurrent des mains et du visage avec de l’eau et du savon, ainsi que le fait d’éviter dans la mesure du possible d’aller dans les villes sont des mesures recommandées également aux frères et sœurs membres des partis politiques, afin de contenir la diffusion des contagions et de permettre le maintien de la vie communautaire.

Le détail précis de notre stratégie passée et actuelle pourra être consulté au moment venu. Pour le moment nous disons, avec le souffle de vie parcourant nos corps, que, selon notre bilan (sur lequel nous pouvons probablement nous tromper), le fait d’affronter la menace en tant que communauté et non comme un problème individuel, ainsi que le fait de diriger notre effort principal en direction de la prévention nous permettent de dire, en tant que peuples zapatistes : nous sommes là ; nous résistons, nous vivons, nous luttons.

Et aujourd’hui, dans le monde entier, le grand capital prétend faire retourner les gens dans les rues pour leur faire réassumer leur condition de consommateurs et de consommatrices. Parce que les problèmes qui les préoccupent, ce sont ceux du Marché : la léthargie dans la consommation de marchandises.

Il faut retourner dans les rues, oui, mais pour lutter. Parce que, comme nous l’avons dit précédemment, la vie, la lutte pour la vie, ce n’est pas un problème individuel, mais collectif. Et maintenant on se rend compte que ce n’est pas non plus un problème de nationalités, c’est un problème mondial.

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Il y a plein de choses de cet ordre que nous observons et que nous écoutons. Et plein sur lesquelles nous réfléchissons. Mais pas seulement...

Cinquièmement. - Nous écoutons et observons également les résistances et les rébellions qui, bien qu’elles soient tues et oubliées, n’en demeurent pas moins essentielles, traçant des pistes pour une humanité qui se refuse à suivre le système dans sa marche forcée vers l’effondrement : le train mortel du progrès qui avance, orgueilleux et impeccable en direction du précipice, tandis que le machiniste oublie qu’il n’est qu’un employé de plus et croit naïvement que c’est lui qui décide du chemin, alors qu’il ne fait que suivre, enfermé, les rails qui le mènent à l’abysse.

Des résistances et des rébellions qui, sans oublier les pleurs pour les personnes disparues, s’acharnent à lutter pour – qui le dirait -, la chose la plus subversive qu’il y ait en ces mondes divisés entre néolibéraux et néoconservateurs : la vie.

Des résistances et des rébellions qui comprennent, chacune à leur manière, à leur rythme et selon leur géographie, que les solutions ne reposent pas sur la foi dans les gouvernements nationaux, et que ce n’est pas protégées par des frontières ni vêtues de drapeaux et de langues différentes qu’elles se conçoivent.

Des résistances et des rébellions qui nous apprennent à nous, tous et toutes, zapatistes, que les solutions pourraient se trouver en bas, dans les soubassements et les recoins du monde. Pas dans les palais gouvernementaux. Pas dans les bureaux des grandes entreprises.

Des résistances et des rébellions qui nous montrent que, si ceux d’en haut coupent les ponts et ferment les frontières, nous pouvons toujours naviguer le long des rivières et des mers pour nous rencontrer. Que la guérison, si elle existe, est mondiale ; qu’elle porte la couleur de la terre, du travail qui vit et qui meurt dans les rues et les quartiers, dans les mers et dans le ciel, dans les montagnes et dans leurs entrailles. Que, tout comme le maïs originel, nombreuses sont ses couleurs, ses tonalités et ses sonorités.

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Tout cela, et plus encore, c’est ce que nous observons et ce que nous écoutons. Et nous nous voyons et nous nous écoutons comme ce que nous sommes : un nombre qui ne compte pas. Parce que la vie ne compte pas, elle ne vend pas, elle ne fait pas la une des journaux, elle n’entre pas dans les statistiques, elle n’entre pas en compétition dans les sondages, elle n’a pas d’appréciation sur les réseaux sociaux, elle ne provoque pas, elle ne représente aucun capital politique, aucun drapeau de parti, aucun scandale à la mode. Qui se soucie qu’un petit, un minuscule groupe d’autochtones, d’indigènes vive, c’est-à-dire lutte ?

Parce qu’il se trouve que nous vivons. Que malgré les paramilitaires, les pandémies, les méga-projets, les mensonges, les calomnies et les oublis, nous vivons. C’est-à-dire que nous luttons.

Et là-dessus nous réfléchissons : en quoi continuons-nous à lutter. C’est-à-dire en quoi continuons-nous à vivre. Et nous pensons que durant toutes ces années, nous avons reçu l’embrassade fraternelle de personnes de notre pays et du reste du monde. Et nous pensons que si la vie résiste ici et que malgré les difficultés elle arrive à fleurir, c’est grâce à ces personnes qui ont défié les distances, les démarches, les frontières et les différences culturelles et linguistiques. Grâce à elles, à eux, à elleux – mais surtout grâce à elles -, les calendriers et les géographies ont été défiés et mis en échec.

Dans les montagnes du sud-est mexicain, tous les mondes du monde ont rencontré et rencontrent toujours une écoute dans nos cœurs. Leur parole et leur action ont alimenté la résistance et la rébellion, qui ne sont que la continuation de celles de nos prédécesseurs.

Des personnes avec les sciences et les arts pour chemin ont trouvé la manière de nous embrasser et de nous encourager, même à distance. Des journalistes, bobos ou non, qui auparavant ont témoigné de la misère et de la mort, et toujours de la dignité et de la vie. Des personnes de toutes les professions et de tous les corps de métier qui, bien que ce soit beaucoup pour nous et peut-être pas grand-chose pour elles et pour eux, ont été là, et continuent à l’être.

Et nous pensons à tout cela dans notre cœur collectif, et il est arrivé à notre pensée que c’est le moment désormais pour que nous, zapatistes, nous rendions la pareille à l’écoute, à la parole et à la présence de ces mondes, proches ou lointains par la géographie.

Sixièmement. - Et nous avons décidé cela :

Qu’il est temps de nouveau que dansent les cœurs, et que ni leur musique, ni leurs pas ne soient ceux des lamentations et de la résignation.

Que différentes délégations zapatistes, hommes, femmes et autres de la couleur de notre terre, nous allons sortir pour parcourir le monde. Que nous prendrons la route ou que nous naviguerons jusqu’aux terres, aux mers et aux ciels lointains, à la recherche non pas de la différence, ni de la supériorité, ni de l’affrontement, et encore moins du pardon et du regret.

Nous partirons à la recherche de ce qui nous rend égaux.

Non seulement l’humanité qui anime nos différentes peaux, nos différentes manières, nos langues et nos couleurs diverses. Mais aussi, et surtout, le rêve commun que nous partageons en tant qu’espèce, depuis que dans cette Afrique qui nous paraît lointaine, nous avons commencé à faire notre chemin, bercés sur les genoux de la première femme : la recherche de la liberté, qui a animé ce premier pas…, et qui continue depuis à faire son chemin.

Que la première destination de ce voyage planétaire sera le continent européen.

Que nous naviguerons jusqu’aux terres européennes. Que nous quitterons les terres mexicaines et lèverons l’ancre durant le mois d’avril de l’an 2021.

Que, après avoir parcouru différents recoins de l’Europe d’en bas à gauche, nous arriverons à Madrid, la capitale espagnole, le 13 août 2021 – 500 ans après la prétendue conquête de ce qui est aujourd’hui le Mexique. Et que, immédiatement après, nous reprendrons la route.

Que nous parlerons au peuple espagnol. Pas pour le menacer, ni pour lui faire des reproches, l’insulter ou exiger de lui quelque chose. Pas pour lui exiger qu’il nous demande pardon. Pas pour le servir, ni pour nous servir.

Nous irons dire au peuple d’Espagne deux choses simples :

Un : Que nous n’avons pas été conquis. Que nous sommes toujours en résistance et en rébellion.

Deux : Qu’ils n’ont pas de raison de demander qu’on leur pardonne quoi que ce soit. Ça suffit de jouer avec le passé lointain pour justifier, avec démagogie et hypocrisie, les crimes actuels et toujours en cours : l’assassinat de militants, comme le frère Samir Flores Soberanes ; les génocides camouflés derrière des méga-projets, conçus et réalisés pour la satisfaction du puissant – celui-là même qui flagelle tous les recoins de la planète – ; le soutien financier et l’impunité accordée aux paramilitaires ; l’achat des consciences et des dignités pour 30 deniers.

Nous, femmes, hommes et autres, les zapatistes, nous NE voulons PAS retourner à ce passé, ni seuls, ni encore moins guidés par ceux qui cherchent à semer la rancœur raciale, qui prétendent alimenter leur nationalisme désuet avec la soi-disant splendeur d’un empire, l’empire aztèque, construit sur le sang de ses semblables, et qui prétendent nous convaincre qu’avec la chute de cet empire, nous, les peuples autochtones, avons été vaincus.

Ni l’État espagnol ni l’Église catholique n’ont à nous demander pardon de quoi que ce soit. Nous ne nous ferons pas l’écho des marioles qui se dressent sur notre sang et qui cherchent ainsi à cacher que leurs mains en sont souillées.

De quoi l’Espagne va-t-elle nous demander pardon ? D’avoir enfanté Cervantes ? José Espronceda ? León Felipe ? Federico García Lorca ? Manuel Vázquez Montalbán ? Miguel Hernández ? Pedro Salinas ? Antonio Machado ? Lope de Vega ? Bécquer ? Almudena Grandes ? Panchito Varona, Ana Belén, Sabina, Serrat, Ibáñez, Llach, Amparanoia, Miguel Ríos, Paco de Lucía, Víctor Manuel, Luis Eduardo Aute pour toujours ? Buñuel, Almodóvar et Agrado, Saura, Fernán Gómez, Fernando León, Bardem ? Dalí, Miró, Goya, Picasso, el Greco et Velázquez ? D’une partie du meilleur de la pensée critique mondiale, estampillée du « A » libertaire? De la République ? De l’exil ? Du frère maya Gonzalo Guerrero ?

De quoi l’Église catholique va-t-elle nous demander pardon ? Du passage de Bartolomé de las Casas ? De Don Samuel Ruiz García ? D’Arturo Lona? De Sergio Méndez Arceo ? De la soeur Chapis ? De celui des prêtres, des sœurs religieuses et des séculiers qui ont cheminé aux côtés des autochtones, sans les diriger ni les supplanter ? De celui des personnes qui risquent leur liberté et leur vie pour défendre les droits humains ?

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L’année 2021 sera celle des 20 ans de la Marche de la Couleur de la Terre, que nous avons réalisée, aux côtés des peuples frères du Congrès National Indigène, afin de réclamer une place dans cette nation qui s’écroule aujourd’hui.

Vingt ans après, nous naviguerons et nous cheminerons pour dire à la planète que, dans le monde que nous percevons dans notre cœur collectif, il y a de la place pour toutes, tous et tous les autres. Tout simplement parce que ce monde n’est possible que si toutes, tous et tous les autres, nous luttons pour le mettre sur pied.

Les délégations zapatistes seront formées majoritairement par des femmes. Pas seulement parce que de cette manière elles veulent rendre l’embrassade qu’elles ont reçue durant les rencontres internationales antérieures. Aussi, et surtout, pour que les hommes zapatistes, nous faisions clairement savoir que nous sommes ce que nous sommes, et nous ne sommes pas ce que nous ne sommes pas, grâce à elles, pour elles, et avec elles.

Nous invitons le Congrès National Indigène – Conseil indigène de gouvernement à former une délégation pour nous accompagner et que soit ainsi plus riche notre parole pour l’autre qui lutte au loin. Nous invitons tout spécialement une délégation des peuples qui lèvent le nom, l’image et le sang du frère Samir Flores Soberanes, pour que sa douleur, sa rage, sa lutte et sa résistance arrivent plus loin.

Nous invitons les personnes qui ont pour vocation, engagement et horizon les arts et les sciences, à accompagner à distance nos navigations et nos pas. Et qu’ainsi elles nous aident à diffuser que c’est dans les sciences et les arts que repose la possibilité, non seulement de la survie de l’humanité, mais aussi d’un monde nouveau.

En résumé: nous partons pour l’Europe en avril de l’an 2021. La date et l’heure ? On ne la connaît pas…, encore.

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Compañeras, compañeros, compañeroas :

Sœurs, frères, et autres :

Ceci est notre volonté :

Face à la puissance des trains, nos canoës.

Face aux centrales thermoélectriques, les petites lueurs que les femmes zapatistes ont confiées aux femmes en lutte dans le monde entier.

Face aux murs et aux frontières, notre navigation collective.

Face au grand capital, un champ en commun.

Face à la destruction de la planète, une montagne naviguant au petit matin.

Nous sommes zapatistes, porteurs et porteuses du virus de la résistance et de la rébellion. En conséquence, nous irons sur les 5 continents.

C’est tout…, pour l’instant.

Depuis les montagnes du sud-est mexicain.

Au nom des femmes, des hommes et des autres zapatistes.

Sous-commandant insurgé Moisés.
Mexique, octobre 2020.

P.S. - Oui, c’est la sixième partie et, comme le voyage, ça se déroulera en sens inverse. C’est-à-dire que suivra la cinquième partie, ensuite la quatrième, puis la troisième, suivie de la seconde avant de terminer par la première.